Les études sur les orthèses craniennes

(voir aussi le blog Les orthèses craniennes ou casques)

LES ÉTUDES RECOMMANDANT LES CASQUES

Plusieurs études non randomisées sont en faveur du casque(1), incluant une étude récente qui a utilisé des scans en trois dimensions (au lieu du craniomètre souvent utilisé dans les études et parfois en clinique et qui donne une mesure en deux dimensions) et qui a fait un suivi à plus long terme, soit à 4 ans de vie.(2)  Le Congress of Neurological Surgeons a émis des lignes directrices basées sur une revue systématique recommandant que les enfants avec une plagiocéphalie sévère soient prescrits une orthèse cranienne tôt dans l’enfance car il y avait une correction voir même normalisation du crâne.(3)

LES ÉTUDES NE RECOMMANDANT PAS LES CASQUES

Par contre, le groupe Choosing Wisely Canada, dont le mandat est de donner une voix nationale pour réduire les tests et traitements en santé qui ne sont pas nécessaires, a émis des recommandations du Canadian Pediatric Neurosurgery Study Group[i], qui ne recommandent pas la prescription d’orthèses craniennes pour les plagiocéphalies légères à sévères.(4)  Ce groupe en est venu à ces recommandations basé sur une série de questionnaires envoyés à leur membre.  Choosing Wisely Canada mentionne aussi une étude randomisée contrôlée pour étayer ses recommandations.  Cette étude était généralement solide incluant une randomisation à simple insu mais contenait plusieurs biais qui en limitaient sa validité.(1)

LES LIMITATIONS D’UNE ÉTUDE RANDOMISÉE CONTRÔLÉE CONTRE LES CASQUES

Malgré la qualité de l’étude citée par Choosing Wisely Canada, basée sur sa randomisation à simple insu,(1) il y avait plusieurs limitations dont voici ci-bas l’analyse point par point.

Limitations de l’étude(1)Réplique/Notre pratique
Un port prolongé du casque de 4 mois, entre l’âge de 6 à 10 mois, et plus si nécessaire.La durée du port du casque usuelle dans notre pratique est de 2 à 3 mois, les résultats optimaux étant obtenus après cette période (pour un port de 23 heures par jour).  De plus un port limité à cette durée de 2-3 mois maximise l’adhésion au traitement et limite la survenue des effets secondaires potentiels.
Jusqu’à 73 % des casques tournaient sur la tête.Le casque doit être bien ajusté à la tête de l’enfant, sans quoi la réponse au traitement est sous-optimale.  Un bon ajustement améliore aussi l’adhésion au traitement avec entre autres un nombre d’heures adéquat de port par jour.
Le taux de participation étant peu élevé, l’étude n’est pas suffisamment puissante pour en généraliser les résultats.On doit être prudent avant d’appliquer les recommandations d’une étude qui manque de puissance.  On en tient compte dans notre pratique et on évalue chaque patient de façon unique au cas présenté.
Le nombre d’heures du port de casque n’a pas été mesuré.Bien qu’il soit possible que le nombre d’heures du port du casque ait été suffisant pour un traitement optimal, l’étude ne permet pas de le démontrer.  Dans notre pratique (tout comme dans l’étude), nous recommandons un port de 23 heures par jour.  Un nombre d’heures moindre diminuerait probablement l’efficacité du casque.
Seuls les bébés nés à terme (plus de 36 semaines) étaient inclus.Les risques d’avoir une plagiocéphalie positionnelle augmentent probablement avec une naissance prématurée vu le décalage dans l’atteinte des jalons de développement moteur.  L’évaluation neuro-développementale est importante dans la décision de prescrire une orthèse cranienne afin d’évaluer la possibilité d’une amélioration naturelle ou pas selon la capacité de l’enfant à être moins souvent couché sur le dos.
Les plagiocéphalies très sévères ont été exclues.Ce groupe a été exclu des recommandations de cette étude.  Il ne m’est pas clair si ce sous-groupe est aussi exclu des recommandations du Canadian Pediatric Neurosurgery Study Group via Choosing Wisely.  Les plagiocéphalies très sévères méritent usuellement dans notre pratique la prescription d’une orthèse cranienne.
Les bébés avec « torticolis musculaire » ont été exclus.La plupart des enfants dans notre pratique ont un torticolis congénital.  Les recommandations de l’étude ne s’appliqueraient alors pas à ces enfants.  Le risque de persistance de la plagiocéphalie en présence de torticolis est augmenté vu la préférence de rotation du cou et de la tête d’un même côté.
Les enfants avec pathologies congénitales ont été exclus.Tout comme les enfants avec naissance prématurée, les retards de développement moteur potentiels des enfants avec pathologies congénitales pourraient augmenter la durée de la persistance de la plagiocéphalie, nécessitant alors un casque pour un traitement optimal de la plagiocéphalie.

Il est intéressant de noter que les parents dont l’enfant avait porté un casque durant l’étude ont montré un taux de satisfaction légèrement plus élevé et un niveau d’anxiété légèrement plus bas au suivi à l’âge de 2 ans.(1)

L’ANALYSE DES EFFETS SECONDAIRES RAPPORTÉS DANS UNE ÉTUDE CONTRE LES CASQUES

Les effets secondaires rapportés étaient fréquents dans l’étude.(1)  Certains sont probablement même plus fréquents en pratique mais sans conséquence tandis que d’autres dépendent plutôt du procédé de fabrication de l’orthèse. Une étude portait exclusivement sur les effets secondaires du casque et rapportait que la plupart des complications étaient très mineures et rentraient dans l’ordre avec l’arrêt du casque.(5)

Effets secondaires rapportés (1)Réplique/Notre pratique
Problèmes à accepter le casque (24 %)La décision doit être prise conjointement avec la famille pour en assurer l’adhésion. 
Irritation cutanée (96 %)Dans notre pratique, la plupart des enfants n’ont pas de réaction cutanée.  Certains enfants peuvent réagir à la mousse du casque ou exacerber leur eczéma.  Pour la réaction cutanée, la mousse peut être recouverte d’une fine pellicule, ce qui règle généralement le problème.  Le traitement de l’eczéma peut avoir à être majoré.  Quand le casque est trop petit, une rougeur peut apparaître, ce qui est un signe que le casque doit être ajusté ou changé.  Des suivis réguliers sont faits avec l’orthésiste pour ajuster le casque.  Quand le casque est débuté avant l’âge de 8 mois, vu la croissance rapide de la tête de l’enfant, il est parfois possible qu’un 2e casque soit prescrit pour compléter le traitement.
Augmentation de la sudation (71 %) et odeur désagréable dans le casque (76 %)Dans notre pratique, ce problème est très fréquent et est plus difficile l’été durant les périodes de chaleur.  Il peut être utile de retirer le casque pendant de courtes périodes pour l’essuyer.  Des moments dans un espace climatisé peuvent aider.
Douleur associée au casque (33 %)  Il n’y pas de douleur associée au casque sauf s’il est trop petit.  Il doit être alors ajusté ou remplacé.  Des suivis réguliers avec un orthésiste sont prévus régulièrement pour éviter ce problème.  Dans l’étude, les casques tournaient sur la tête indiquant un ajustement sous-optimal, ce qui pourrait expliquer l’effet secondaire rapporté
Impression parentale de ne pas pouvoir faire des câlins à leur enfant (77 %)Cet effet secondaire n’est usuellement pas rapporté dans notre pratique.  Dans nos recommandations aux parents, on les rassure de l’innocuité du problème étant donné qu’il s’agit de plagiocéphalies positionnelles, que le port du casque est généralement bien toléré par les enfants et que la durée du traitement est limité à 2-3 mois seulement.

RÉFÉRENCES

1.         van Wijk RM, van Vlimmeren LA, Groothuis-Oudshoorn CGM, Van der Ploeg CPB, IJzerman MJ, Boere-Boonekamp MM. Helmet therapy in infants with positional skull deformation: randomised controlled trial. 2014;348:g2741.

2.         Kunz F ST, Grose S, et al. Head orthosis therapy in positional plagiocephaly: longitudinal 3D-investigation of long-term outcomes, compared with untreated infants and with a control group. Eur J Orthod. 2019;41(1):29-37.

3.         Tamber MS ND, Beier A, et al. Congress of Neurological Surgeons Systematic Review and Evidence-Based Guideline on the Role of Cranial Molding Orthosis (Helmet) Therapy for Patients With Positional Plagiocephaly. Neurosurgery. 2016;79(5):E632-E3

4.         Group CPNS. Five Things Physicians and Patients Should Question. Choosing Wisely. 2021.

5.         Gump WC MI, Moriarty TM. Complications associated with molding helmet therapy for positional plagiocephaly: a review. Neurosurg focus.35(4):E3.


[i] Groupe composé de neurochirurgiens pédiatriques qui pratiquent la médecine au Canada.

Blog mis à jour le 2022-3-27